Quand Brel suppliait “ne me quitte pas”, l’histoire d’une chanson incomprise
Publié le 13/10/2018 à 12H00
Jacques Brel en scène
© France 2 Culturebox capture d’écran
La chanson “Ne me quitte pas”, le premier vrai succès de Jacques Brel, est enregistrée en 1959. Elle est cosignée par Gérard Jouannest, le pianiste qui accompagne l’artiste belge. Elle a choqué à sa sortie, on n’était pas habitué à entendre un homme renoncer à toute dignité par amour pour une femme qui le quitte. Voici l’histoire de cette chanson devenue un standard du répertoire international.
The song “Ne me quitte pas”, Jacques Brel’s first real success was released in 1959. It was arranged by Gérard Jouannest, who was also the Belgian’s pianist. It became very popular as it wasn’t unusual for a man to renounce everything for the love of a woman, who left him.
Il faut entendre la chanson, il faut surtout voir Brel l’interpréter. Il met dans son regard toute la supplication que les mots, même d’une extrême impudeur, ne peuvent pas apporter. Brel ne considère pas “Ne me quitte pas” comme une chanson d’amour mais comme le portrait d’un homme lâche, renonçant à toute dignité en espérant ainsi regagner la femme qui le quitte. La pire solution bien sûr.
Il va si loin que la phrase la plus violente de cette résignation “laisse moi devenir…/… l’ombre de ton chien” sera expurgée par des artistes lors de leur reprise de la chanson, ainsi Barbara qui saute simplement le vers, sans même l’adapter. C’est au point que de “Ne me quitte pas”, à l’origine destinée à une interprète féminine, Edith Piaf dira dans une phrase restée célèbre “Un homme ne devrait pas chanter des trucs comme ça !”. Il est vrai qu’à l’époque, l’image de l’homme véhiculée dans les chansons à la mode était plus macho, virile et pour tout dire un peu crétine. L’un des grands succès de 1959 (l’année de sortie de “Ne me quitte pas”) était un refrain interprété par Eddie Constantine et intitulé “Cigarettes, whisky et p’tites pépées” !